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Publié le 29 août 2013 | par Nadia Bellifa

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Le très haut débit pour tous, c’est pour quand ?

L’ARCEP (autorité de régulation des communications électroniques et des postes) a publié son rapport début juillet 2013. Trois évènements majeurs ont marqué l’année 2012 : le passage au très haut débit, l’arrivée de Free mobile sur le marché, le lancement de la 4G.

Autre nouvelle qui ne sera pas sans déplaire aux usagers, de nouvelles dispositions pour la protection des consommateurs concernant la tarification des réseaux fixes et mobiles entreront en vigueur dès le 1er janvier 2015. Le rapport étant conséquent, cet article se concentrera uniquement sur le passage au très haut débit.

L’aménagement numérique de la France

Du cuivre à la fibre optique

Depuis les années 2000, la boucle locale de cuivre de France Telecom ainsi que les réseaux hertziens terrestres et satellitaires ont permis aux utilisateurs n’accéder au haut débit (supérieur ou égal à 510 kbit/s jusqu’à 30Mbit/s). La boucle locale représente 33 millions de lignes réparties sur 15 000 NRA (nœud de raccordement d’abonnés). France Telecom a déclaré que sur l’ensemble total des lignes, seule 0,7% étaient inéligibles. Soit elles le sont en conséquence de l’atténuation du signal DSL (Digital Subscriber Line ou LNA ou Ligne Numérique d’Abonné) dû à l’éloignement des locaux techniques, soit à cause des multiplexeurs qui regroupent les signaux téléphoniques de plusieurs abonnés sur une seule paire de cuivre.

Sur 15 000 NRA, 90% sont éligibles pour la diffusion TV sur ADSL, pourtant seule ⅔ peuvent y accéder, soit à cause de la longueur des lignes en cuivre, soit parce que les opérateurs proposant ces services ne couvrent pas la région concernée. Les 10% de NRA restant ne disposent pas de la technologie nécessaire pour assurer la transmission des services de télévision.

L’arrivée de la concurrence et le dégroupage des NRA

France Telecom a équipé l’ensemble des NRA, ce qui n’est pas le cas des concurrents nouvellement arrivés. En 2012, 450 NRA ont été dégroupés, ce qui porte le total à 6 500 NRA dégroupés. Un NRA est considéré comme dégroupé dès lors qu’un autre opérateur aménage la ligne avec ses équipements DSL. L’arrivée de la concurrence et le dégroupage ont eu l’avantage pour les consommateurs de multiplier les offres de services et de baisser les tarifs.

Le dégroupage des lignes se fait aujourd’hui sur les plus petits NRA soit par les nouveaux opérateurs, soit par les collectivités territoriales, ce qui permet d’aménager l’ensemble du territoire.

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La fibre optique

La fibre optique a été développée dans les années 70 aux États-Unis, et déployée dans les réseaux dorsaux de la France à la fin des années 80. Elle est aujourd’hui la technologie la plus adaptée à pouvoir supporter le débit des nouveaux usages de l’Internet (TV via la DSL et vidéo à la demande). Les multiplexages les mieux équipés permettent d’augmenter le débit de la bande passante de 1 Gbit/s à plusieurs centaines de Gbit/s.

Les réseaux de collecte appartiennent en majorité à France Telecom. Depuis 2004, les collectivités territoriales ont complété le réseau avec 35 000 km de réseau de collecte.

DS_-_aménagement_numérique_-_réseau copie

Au total, le réseau de collecte représente 90 000 km, dont 70 000 km aménagés en fibre optique.

Évidemment, Les régions de France les plus favorisées en termes de technologie sont celles qui disposent de la fibre optique, les zones rurales sont encore desservies par les câbles en cuivre, ce qui réduit considérablement la bande passante.

Pour réduire la disparité entre les régions, l’ARCEP a donc défini une feuille de route :

  • Améliorer les réseaux de collecte qui disposent déjà de la fibre optique mais qui sont saturés.
  • Engager des travaux pour les zones rurales qui ne disposent pas de la fibre optique.

Ces aménagements passeront par les collectes existantes dont la plupart sont fournis par l’offre LFO de France Telecom, ainsi que par la création de nouvelles offres en adéquation avec les besoins de l’ensemble des opérateurs.

France Telecom s’est engagé sur la mise en place de travaux pour élargir la disponibilité de son offre LFO et d’étendre le dégroupage aux plus petits NRA en abaissant ses tarifs LFO. De plus, l’opérateur a créé une nouvelle offre depuis le printemps 2013 pour les 5% de NRA qui ne disposent pas de la fibre optique.

Comme nous l’avons dit plus haut, l’augmentation du débit est entravée par la longueur de certaines lignes de cuivre. Deux technologies peuvent éradiquer une partie de ce problème :

  • Le réaménagement de la sous boucle locale de cuivre et l’offre de gros de  création de points de raccordement mutualisés qui permet de raccourcir les lignes de cuivre (offre PRM de France Telecom). L’ARCEP a édité un guide sur la mise en œuvre de la montée en débit pour les collectivités territoriales.
  • Le VDSL2 autorisé depuis avril 2013, par lequel l’opérateur Free a pu desservir une partie de la Dordogne. Cette technologie permet d’atteindre un débit descendant de 50 Mbit/s contre 20 Mbit/s pour la technologie ADSL2. Cependant, cette montée en débit n’est possible que pour les lignes de moins d’un kilomètre, au-delà elle perd de sa puissance.
Le FttH

La technologie FttH (Fibre to the Home = fibre jusqu’au domicile) permet de déployer la fibre optique jusqu’au domicile de l’abonné alors que la technologie FttLA (Fibre to the Last Amplifier) ou FttB (Fibre to the Building = Fibre jusqu’au bâtiment) remplace une partie des câbles coaxiaux par de la fibre optique jusqu’à la zone concernée (quartier, immeuble, rue).

Cette technologie est très onéreuse, pour cette raison elle est surtout déployée dans les zones urbaines. Pour réduire cette fracture numérique qui frappe surtout les départements les moins urbanisés, la loi Pintat du 17 décembre 2009 a mis en place les SDTAN (schéma directeur territorial d’aménagement numérique). Actuellement, la plupart des départements ont lancé un SDTAN, mis à part les départements les départements le plus denses (Bouches-du-Rhône, Hauts-de-Seine et Paris).

DS_-_amenagement_numerique_SDTAN

En 2012, les prises éligibles au FttH ont augmenté de 46%, ce qui porte leurs nombres à 2 165 000.

Étant donné le coût de la mise en œuvre de cette technologie, les zones les moins denses sont aujourd’hui financées par des fonds publics, mais quelques opérateurs privés commencent à déployer le FttH depuis 2011. Au total les collectivités territoriales ont équipé 360 000 prises éligible

Afin d’éviter les duplications inutiles et un usage monopolistes des réseaux FttH, le co-financement et la mutualisation des déploiements FttH est encadré par plusieurs textes législatifs et recommandations. La mutualisation s’effectue essentiellement dans les régions les moins urbanisés et s’applique à près de 80% des habitations (24 millions de lignes).

Depuis 2012, l’ensemble des opérateurs sont en phase d’industrialisation des processus de déploiement et d’exploitation. La plupart d’entre eux ont mis en place une harmonisation des interfaces de leurs systèmes et des processus métiers (SAV, prises de commandes…). Dorénavant, les opérateurs se regroupent au sein du groupe Interop’Fibre afin de réguler la standardisation du processus d’industrialisation.

L’enjeu numérique pour la compétitivité des entreprises fait également partie des projets majeurs de l’aménagement du territoire. À ce titre, la desserte des zones d’activités raccordées à la FttO (Fiber To The Office = fibre jusqu’au bureau) est passé de 21 à 75.

Les réseaux câblés

Le passage au très haut débit est également soutenu par les réseaux câblés, notamment celui de Numericable qui dessert actuellement 4 789 000 logements. Ces habitations sont reliées par un réseau en fibre optique qui finit par un câble coaxial qui leur permet d’atteindre un débit supérieur à 100 Mbits/s. D’autre part, 3 671 000 logements sont couverts par un réseau câblés permettant un débit entre 30 Mbits/s et 100 Mbits/s. Au total 8,85 millions d’habitations sont éligibles au très haut débit, dont certains ont accès aux réseaux câblés ainsi qu’au réseau FttH.

La boucle locale radio pour un usage sans fil et en mobilité

Depuis un appel à candidature en 2005, plusieurs acteurs ont pu bénéficier de l’autorisation de boucle locale radio. Aujourd’hui 23 opérateurs sont autorisés à mettre en place cette technologie WiMax qui permet d’accéder au haut débit sans fil. Cependant certains d’entre eux n’ont pas pu tenir leurs engagements et la plupart des déploiements ont été réalisés par les collectivités territoriales. L’ARCEP a cependant décidé de ne pas sanctionner ces entreprises. Un accord, convenu avec elles, les pousse à soit engager le déploiement ou bien mettre à disposition les fréquences pour les collectivités territoriales, soit restituer leurs licences aux départements qui sont dépourvus de cette technologie.

La promesse du gouvernement

François Hollande s’est engagé, lors d’un discours en février 2013, à ce que le territoire soit entièrement aménagé au très haut débit d’ici 10 ans. Pour se faire, le gouvernement va contribuer à la hauteur de 3 milliards d’euros de subventions aux collectivités territoriales, ainsi qu’une mise à disposition de 20 milliards d’euros en prêts d’épargne.

Un nouvel organisme sera prochainement créé afin de veiller au déploiement des réseaux et d’assurer la distribution des financements. Pour le moment, le gouvernement encadre ces projets via la création fin 2012 d’une mission très haut débit, pilotée par Antoine Darodes, ancien directeur du haut et du très haut débit à l’ARCEP, et par Fleur Pellerin, ministre déléguée aux petites et moyennes entreprises, à l’innovation et à l’économie numérique.

Ce programme national participera sans doute à la réduction de la fracture numérique en France entre les usagers et les régions, mais la France a tout de même pris un retard considérable par rapport à d’autres pays, comme la Corée du Nord qui est entièrement équipée depuis déjà 5 ans.

 


Source

  • http://www.arcep.fr/uploads/tx_gspublication/rapport-activite-2012.pdf

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